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L'essentiel de la jurisprudence - Décembre 2022

4 arrêts du 1er décembre 2022 rendus par la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation, n° 21-15.392, n°21-19.341, n°21-19.342 et n°21-19.343, Publiés au Bulletin :

Application de l’article L. 113-1 du Code des assurances et mise en jeu de la garantie perte d'exploitation.

Des restaurateurs souhaitant être indemnisés par leur assureur des pertes d’exploitation qu’ils ont subies pendant la période de confinement liée à la Covid-19, ont fait valoir que la garantie « perte d’exploitation devait s’appliquer ».

En effet, la garantie perte d’exploitation peut être mise en œuvre en cas de fermeture administrative d’un établissement, fermeture consécutive à une épidémie. Cependant, elle est exclue dès lors que deux établissements du même département font l’objet d’une fermeture administrative au même moment et pour des causes identiques. La Cour de cassation retient que cette clause d’exclusion est formelle et limitée et donc valable. L’assureur n’est donc pas tenu d’indemniser les restaurateurs.

Des restaurateurs ont souhaité être indemnisés des pertes d’exploitation qu’ils ont subi pendant la période de confinement liée à la Covid-19.

La clause stipulée dans leurs contrats prévoit que « la garantie est étendue aux pertes d’exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l’établissement assuré, lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente, et extérieure à vous-même. 2. La décision de fermeture est la conséquence d’une maladie contagieuse, d’un meurtre, d’un suicide, d’une épidémie ou d’une intoxication ».

Cependant, l’assureur des restaurateurs, AXA, a refusé sa garantie en opposant l’exclusion suivante : « sont exclues les pertes d’exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelles que soient sa nature et son activité, fait l’objet, sur le même territoire départemental que celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».

Les assurés ont assigné l’assureur devant les Tribunaux de commerce compétents et un appel a été interjeté.

Aux termes de l’article L. 113-1 du Code des assurances :

« Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police. »

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence a retenu :

- Que la clause d’exclusion n’était pas suffisamment limitative en ce qu’elle visait tout autre établissement, peu importe sa nature ou son activité, faisant l’objet d’une fermeture administrative pour une cause identique.

- Que la notion de cause identique posait un problème quant à son interprétation, notamment dans le cas d’une épidémie.

- Que l’hypothèse dans laquelle l’épidémie ne touchait qu’un seul établissement était purement fictive.

En conséquence elle a déclaré que la clause devait être réputée non-écrite et que l’assureur était tenu d’indemniser les restaurateurs.

L’assureur s’est pourvu en cassation.

La Cour de cassation s’est prononcée sur le caractère formel et limité de la clause d’exclusion opposée par l’assureur dans les cas d’espèce.

- Sur le caractère formel : La Haute juridiction a rappelé que la condition posée par l’exclusion est celle de la fermeture administrative simultanée de deux établissements pour une des causes identiques parmi celles listées, dont l’épidémie faisait partie. Elle a précisé que la garantie couvrait le risque de perte d’exploitation consécutif à une fermeture administrative et non à une épidémie. La Cour a ajouté que le terme épidémie n’avait aucune incidence sur la compréhension de l’assuré des situations dans lesquelles l’exclusion lui était opposable.

- Sur le caractère limité : La Cour de cassation a rappelé que la clause ne devait pas vider la garantie de sa substance, c’est-à-dire qu’après application de l’exclusion, elle ne devait pas laisser subsister qu’une garantie dérisoire. En l’espèce, la clause d’exclusion énumère des situations précises dans lesquels la garantie de l’assureur ne joue pas. Aussi, dans tous les autres cas, la garantie perte d’exploitation peut être mise en œuvre. La clause d’exclusion ne vide donc pas la garantie de sa substance.

La Haute juridiction a retenu ainsi que la clause d’exclusion de la garantie perte d’exploitation, dans les espèces soumises, était formelle et limitée. Elle a donc cassé les arrêts d’appel et débouté les restaurateurs assurés.

· Cour de cassation, 2ème Chambre civile, 15 décembre 2022, n°19-25.339, Publié au Bulletin,